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Hua Tuo (110–207 ap. J.-C.) soignant Guan Yu, héros des Trois royaumes Les légendes
L’histoire et les légendes du karaté sont assez mystérieuses. Des méthodes ressemblant au karaté ont toujours existées que ce soit dans la Perse Antique, en Chine ou dans le sud-est asiatique. Là où il y avait des hommes, on était certain de trouver des combats, avec ou sans armes.
Hua Tuo soignant Guan Yu, héros des Trois royaumesOn pense que le Karaté, art de la self-défense, a pris naissance en Inde il y a cinq mille ans. C’est là, selon une légende, qu’un prince, qui passait son temps à observer et à analyser les combats des animaux, classa ses observations et en tira un certain nombre de techniques de combat utilisables par l’homme. Une autre légende se rapporte à la Chine au 3e siècle avant Jésus-Christ lorsqu’un célèbre médecin nommé Hua T’o mit au point des mouvements de gymnastique dont la source d’inspiration fut l’observation des mouvements des animaux.
Bodhidharma (6e siècle ap. J.-C.), block de bois imprimé par Yoshitoshi, 1887 Le shaolin-su-kempo
Les légendes mises à part, l’histoire a cependant retenu un nom : Bodhidharma, moine indien. Venu en Chine vers 520 ans après Jésus-Christ pour y prêcher le bouddhisme, il s’installa au monastère de Shaolin-Lin-Su (Shorin-Ji, en japonais). Sa méthode était basée sur des exercices physiques destinés à fortifier le corps par des mouvements de faible amplitude ainsi que de longues séances de méditation accompagnées de techniques de respiration. Son système fut considéré comme une méthode de combat efficace qui se propagea à travers la Chine sous le nom de Shaolin-Su-Kempo. Bodhidharma l’avait créée dans le but d’unir le corps et l’esprit et c’est sans doute cet aspect qui fut décisif dans l’orientation et le sens futur des arts martiaux.
Les écoles de boxe chinoise
Les techniques de Bodhidharma influencèrent la boxe chinoise (déjà connue et pratiquée depuis longtemps) tandis que les techniques de combat purement chinoises continuaient à se développer parallèlement. De l’ancien Chiao-Ti-Shu naquit le Kenyu, qui devint à son tour le Kempo actuel. Par ailleurs, le vieux jiu-jitsu découla du sumo tandis que le T’ai-chi-chuan, jalon essentiel dans l’histoire du karaté actuel, tira son origine du Kan-Fa.
Les techniques chinoises se divisaient en deux catégories ; le Lung-Hua-Chuan constitué d’un ensemble de prises pour le corps à corps et le T’ai-Chi-Chuan qui était une méthode d’escrime pugiliste et pédestre (poing et pied) mais qui devint progressivement une technique visant davantage la conservation de la santé qu’une possible victoire sur un champ de bataille. Au milieu du XVII siècle, plusieurs méthodes se côtoient. Quelques-unes se réfèrent à l’ancien Shao-Lin-Su-Kempo, d’autres sont d’origine purement chinoise. De toute manière et indéniablement, on retrouve la trace de la culture chinoise dans les arts martiaux.
Okinawa dans les iles Japonaises Okinawa
Okinawa est une île de l’archipel des Ryu-Kyu qui prolonge le Japon vers le sud, elle passera sous la domination chinoise (XVe siècle) avec les empereurs Ming. Ces derniers, par peur de révoltes, interdisent l’usage de toutes les armes, peu importe la forme. Les indigènes farouchement opposés à cette interdiction travaillent alors les anciennes techniques locales de combat sans armes. Il en émergera trois écoles de base : Shuri-Te, Naha-Le et Tomari-Te. En outre, des immigrants et des commerçants y introduisent leur «art du poing», le Kempo chinois. Il est donc clair que c’est au contact du monde chinois que s’élabore la forme définitive du combat à mains nues avant que celle-ci ne trouve un retentissent succès mondial au Japon sous le nom de Karaté.
En 1609, un seigneur féodal japonais écrase la dynastie chinoise et maintient l’interdiction des armes. De cette nouvelle interdiction naquit l’Okinawa-Te, mélange de Kempo et de techniques locales. Dans l’Okinawa-Te, tout est basé sur l’efficacité absolue et instatanée.
Vers 1900, l’étude de l’Okinawa-Te fut systématisée mais dorénavant dans un but pacifique. En effet, on reconnut dans cette technique un remarquable moyen d’éducation et on décida de l’enseigner dans les écoles publiques. Les instructeurs en chef furent Itosu et Higaonna, ils mirent au point le style classique de l’Okinawa-Te. Ce fut l’époque de la formation de ceux qui allaient devenir les maîtres dont nous respectons la mémoire et qui portèrent l’enseignement de cet art hors d’Okinawa : Funakoshi, Mabuni, Kyam, Motobu, Yahiku, Ogusuku et Myagi. En traversant le bras de mer qui sépare l’île du reste du Japon, l’unicité du style d’Okinawa se brisa mais cela lui permit de connaître un essor prodigieux, entre autres, par la multiplication du nombre d’adeptes et aussi, conséquence moins heureuse, par la prolifération des styles.
Gichin Funakoshi, 1868 - 1957 Gichin Funakoshi et l’étape japonaise
Au début du XXe siècle donc, les instructeurs d’Okinawa acceptèrent enfin de divulguer leur art hors de leur île. Parmi eux se trouvait Gichin Funakoshi.
C’est en 1922, à Tokyo, lors d’une démonstration par maître Gichin Funakoshi que les Japonais réalisèrent la naissance du karaté moderne tel que nous le pratiquons aujourd’hui. Funakoshi fut alors prié par le ministre de l’Éducation nationale de rester au Japon pour y propager sa technique. Il se mit alors à enseigner dans différentes universités et y forma les maîtres suivants : Otsuka, Obata, Matsumato, Otake et Takagi. En 1936, il fonda son dojo personnel à Tokyo, le Shotokan. Il faut préciser que Funakoshi ne présentait plus son art comme une technique guerrière mais plutôt comme une méthode permettant d’atteindre la vérité philosophique. Plus tard, deux de ses camarades, Mabuni et Myagi fondèrent respectivement les styles Shito-Ryu en 1926, et Goju-Ryu en 1931. Un 4e style apparut en 1935 : le Wado-Ryu créé par Hironori Otsuka. Pour fins de comparaison, notre style, le Yoseikan, fut créé durant les années cinquante par maître Hiroo Mochizuki.
Conclusion
Plusieurs élèves, issus de ces maîtres, créèrent à leur tour leur style de même que les élèves des élèves et ainsi de suite... C’est pourquoi aujourd’hui, on ne tente même plus de réunir sous une même bannière, comme le judo l’a si bien fait, les centaines de fédérations qui représentent des centaines et des centaines de styles. C’est d’ailleurs bien au détriment des anciens Maîtres que la majorité des styles se sont orientées vers la compétition, pratiquant ainsi ce qu’ils nommèrent un sport de combat plutôt qu’un art de combat. Enfin, l’important c’est d’avoir le plaisir de pratiquer votre art (Yoseikan-Ryu en est toujours un) tout en progressant vers l’harmonie esprit/corps.
RECHERCHE ORIGINALE : JACQUES A. MARLEAU BIBLIOGRAPHIE : LE KARATÉ, MARABOUT-SERVICE (ROLAND HABERSETZER) MISE EN PAGE ET RÉVISION TECHNIQUE : ANDRÉ BERTRAND (2000 ET 2004) RÉVISION FINALE : MICHEL SHAHEEN (2004)
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